Seul le pardon libère l'homme d'un fardeau inhumain et insupportable. Voilà pourquoi la "morale" de la réciprocité, comme le revendique l'athéisme, n'en est pas une, qui ajoute un fardeau à un autre. La réciprocité ne guérit rien, ne rétablit rien dans son équilibre originel, mais au contraire consolide le déséquilibre créé par une injustice. La réciprocité n'est guère mieux qu'un code d'honneur maffieux et sa vendetta.
« Si tu as tué, tu t'engages à demander pardon à la victime rescapée, comme cela tu l'aides à se libérer du poids de la vengeance, de la haine et de la rancune.
Si tu es victime, tu t'engages à offrir ton pardon à celui qui t'a fait du tort et ainsi tu l'aides à se libérer du poids de son crime et du mal qui l'habite ». (Le deuxième Synode africain Réconciliation, Justice et Paix, P155)
Voyez comme le pardon est par essence totalement gratuit, puisqu'il aide l'autre à se libérer du poids. Ainsi on ne pardonne pas pour se libérer soi-même, mais pour l'autre.
S'il y a un film qui illustre de façon exemplaire le pouvoir du pardon, c'est "Mission", qui donne au cinéma probablement l'une de ses scènes les plus puissantes et retournantes : il s'agit de ce colon en Amérique du Sud, soldat-bourreau et chasseur d'esclaves, qui retourne vers ses victimes, trainassant pitoyablement le poids du fardeau de ses armes assassines dans les conditions les plus inhumaines. Il se présente misérablement devant elles. Un indien s'approche de lui le poignard à la main. Il coupe le lien de son fardeau qu'il portait obstinément, et qui se précipite pour s'évanouir dans les rapides.
Le criminel est pardonné, il est libéré de son poids. Il était mort, le voilà revenu à la vie.