Quelqu'un, visiblement distrait, oublia son marteau alors que Benoît XVI allait prononcer un discours devant le président de la République de Chypre et quelques diplomates.
Benoît, bricoleur à ses heures, ne pu résister, le subtilisa. Le voici dans ses oeuvres :
"Une deuxième voie pour promouvoir la vérité morale consiste à déconstruire les idéologies politiques qui voudraient supplanter la vérité. Les expériences tragiques du XXe siècle ont mis à nu l'inhumanité qui s'ensuit lorsque la vérité et la dignité humaine sont niées. De nos jours, nous sommes témoins de tentatives pour promouvoir de supposées valeurs sous le couvert de la paix, du développement et des droits humains. En ce sens, en m'adressant à l'Assemblée générale des Nations-unies, j'ai attiré l'attention sur des tentatives conduites en certains lieux pour réinterpréter la Déclaration universelle des Droits de l'Homme dans le but de donner satisfaction à des intérêts particuliers qui compromettraient la cohérence interne de la Déclaration et l'éloignerait de son objectif originel."
L'âne du Zarathoustra se retourne subito contre son maître. Son coup de pied est magistral : déconstructeurs, nous allons vous déconstruire, vous et vos remèdes de charlatan ; vos masques en bec de canard vont tomber, et révéler les relents de vos pensées difformes, produit du fondement d'intellos marécageux collecté au tout-à-l'égoût philosophique .
Pape roublard, à la pique assassine, rusé comme le serpent, innocent comme la colombe : il se sert de l'arme mise au point par les ennemis du genre humain, pour confondre leurs mensonges et mettre à nu leur vrai néant. Ceux qui vivent par le marteau périront par le marteau.
Déconstruire les idées et théories délirantes de ceux qui ont juré la perte de l'homme à coup de déconstruction et de reconstruction à la Frankenstein : voilà encore un éclair lumineux et plein de rouerie de ce pape qui est bien l'homme de ce début de siècle. Voilà qui fait oeuvrer le chrétien radicalement pour le bien commun. Voilà un programme politique.
Il est curieux à ce propos que Benoît XVI reprenne presque mot pour mot le livre de François Huguenin, "Résister au libéralisme", et commenté comme suit par Luc Pinson :
"L’audace des penseurs que François Huguenin met en valeur dans son dernier essai, consiste à prendre de front un certain amoralisme libéral, en revenant à des notions aussi centrales que la vérité, le beau et le bien commun. Mais, nous explique t-il, l’audace d’un jeune théologien laïc comme William Cavanaugh est plus grande encore, puisqu’il conteste les définitions et les prétentions de l’État moderne. Ainsi se permet-il de déconstruire la légende de la légitimité politique fondée sur la rupture avec la religion.
...
Depuis Maritain, les chrétiens ont renoncé à affronter les fondements du politique. Trop souvent, les grands mots de démocratie, de droits de l’homme, de laïcité, sont brandis comme des fétiches, alors qu’il faudrait les retravailler, les déconstruire pour les reconstruire. L’auteur montre que de nouveaux courants ne craignent pas de repenser la politique dans la recherche d’une nouvelle cohérence avec leur foi, parfois hésitante, mais stimulante."
La différence : les déconstructeurs habituels ne sont que des grossiers dynamiteurs. Ils dynamitent la maison de pierre pour bâtir un taudis en carton. Les déconstructeurs de ces déconstructeurs sont des artisans maçons. Ils rasent pour rebâtir le solide, le vrai.
Notes :
Pour le discours de Benoît XVI, voir la dépêche Zenit
Pour la critique du livre de François Huguenin, voir le site libertépolitique.