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L'islam des terroristes (suite)

Contre Malek Chebel, et dans la suite de l'article du Guardian, un article paru dans Spiegel du 10/02/2015.

Il est remarquable que dans deux organes chantres du multi-kulti, on trouve pour ainsi dire deux articles qui posent la question sans détour de la violence dans l'islam, avec des réponses similaires : oui ISIS applique un islam juridiquement et théologiquement soutenable. La prolifération des excroissances islamistes ultra violentes est telle qu'on ne peut plus parler, depuis longtemps en fait, d'épiphénomène.

 

Ci dessous une rapide traduction :

Par Hasnai Kazim, Istanbul

Est-il possible de justifier la violence au nom de Dieu ? Qu'est-ce que le terrorisme a à voir avec l'islam ? Ednan Aslan, professeur en éducation religieuse, affirme : "Les musulmans doivent ré-interpréter leur croyance."
Les caricaturistes du magazine français Charlie Hebdo furent tués dans un attentat commis au nom de l'islam. L'organisation terroriste de l'Etat Islamique du Levant (ISIS) tue des otages an nom de la religion [NDT : de leur religion]. Des dizaines de groupes, des Talibans au réseau Al-Qaida en passant par des petites cellules de djihadistes en Afrique, au Proche, Moyen et Extrême-Orient, se battent pour répandre leur représentation extrémiste de l'islam.
Les principales victimes de la terreur islamiste sont les musulmans, et la plupart des musulmans sont choqués par ces actes violents. Mais le débat intellectuel sur cette violence n’apparaît que très rarement. En fait, beaucoup de musulmans esquivent le problème par une pirouette comme "l'islam est une religion de paix, et les terroristes ne sont pas des musulmans" - une erreur, comme le pense Ednan Aslan. Vous trouverez ci-dessous une interview avec ce professeur d'éducation religieuse islamique basé à Vienne.

 

Biographie :
Ednan Aslan est né en 1959 dans l'est de la Turquie. Il étudia à Tübingen et Stuttgart et fit sa thèse sur l'éducation religieuse des enfants musulmans en Allemagne et en Autriche. Il enseigne à l'université de Vienne, et accuse la théologie islamique de se fonder jusqu'ici avant tout sur la violence.

Spiegel Online : Monsieur Aslan, les terroristes se réclament de l'islam. Des musulmans disent : "cela n'a rien à voir avec l'islam." La violence est-elle théologiquement justifiée ou non ?

Aslan : Récemment un pilote jordanien a été brûlé vif par les combattat d'ISIS. C'est un acte choquant qui peut être expliqué par la loi islamique *, mais seulement si nous faisons revivre les vieilles fondations légales, non les modernes. C'est exactement ce que font ces terroristes. Le calife Abu Bakr par exemple, le premier successeur du prophète Mahomet, a, selon la tradition, brûlé des villages entiers parce qu'ils avaient apostasié. Cela s'est produit au 7° siècle, une époque complètement différente, et même alors cette action fut critiquée. Mais malheureusement de telles interprétations légales sont à présent ressuscitées et enseignées dans des facultés de théologie en Arabie Saoudite, au Pakistan, ou en Turquie.

 

SO : Pourquoi dans ce cas d'autres musulmans affirment que cette violence n'a rien à voir avec l'islam ?

A: Beaucoup de musulmans sont très modernisés et ne connaissent pas cette ancienne interprétation de la théologie islamique. Vous ne pouvez pas imaginer qu'une telle violence barbare peut avoir un lien avec l'islam lui-même. La vaste majorité des musulmans rejettent le terrorisme. Mais malheureusement la loi islamique constitue toujours un fondement pour la violence. Beaucoup croient que cette loi n'est pas applicable aujourd'hui. Mais nous voyons qu'il y a des jeunes gens dans cet Etat Islamique qui mettent en pratique ces vieilles lois. Cela n'est en aucun cas une nouveauté : en Iran il y a toujours la lapidation, et en Arabie Saoudite presque chaque semaine des gens sont exécutés par l'épée. C'est une partie de la réalité islamique.

SO : Pendant que nous nous tournons avec dégoût nous faisons des affaires avec l'Arabie Saoudite.

A: Oui, c'est nos doubles standards qui choquent beaucoup de gens dans les pays islamiques. D'un côté nous condamnons les criminels de l'IS en Irak et en Syrie, de l'autres nous faisons du commerce avec des pays qui sont régulièrement et systématiquement responsables d'actes comparables. Avec ces double standards l'Occident dévalue également la démocratie, parce que de nombreux musulmans disent : "si c'est cela la démocratie, nous ne la comprenons pas." Cela affecte l'image de l'Occident.

SO : L'image de l'islam souffre de ce que les musulmans très pratiquants ont une lecture littérale du Coran et refusent d'interpréter ces écritures. Qu'est ce qui doit changer selon vous ?

A: L'islam est bien sûr ce que nous en faisons. La façon dont nous le pratiquons et vivons correspond au degré de notre maturité spirituelle. L'islam est ce que sont les musulmans. Le Coran est certes un livre fermé, mais notre compréhension des écritures saintes est un processus continu. Une religion n'est par conséquent jamais achevée, parce que les gens travaillent dessus  continuellement. Malheureusement je constate que la maturité intellectuelle de beaucoup de musulmans du XII° fut bien plus développée que maintenant, au XXI°. Les débats critiques qui furent menés il y a  800 ans à Bagdhad sont à présent impensables, parce que beaucoup de msulmans les considèrent comme non islamiques. A ce jour il n'est pas permis d'envisager une meilleure perspective, comme si l'on ne pouvait vivre un islam imprégné des valeurs européennes. Cela me fait m'inquiète.

SO: Mais comment pouvons-nous rendre à l'avenir un tel débat possible, sans avoir à craindre pour sa vie ?

A: Nous avons besoin de réformer l'enseignement du droit dans l'islam, et former l'islam à partir de la tradition des  Lumières européennes. Par ailleurs les facultés de théologie dans les pays islamiques doivent être rénovées. Elles devraient être tournées vers l'avenir, non vers l'histoire, de sorte que les gens puissent vivre sans contradiction entre la société moderne et les préceptes religieux. En Turquie certains se réfèrent de plus en plus à l'Empire Ottoman. Je considère que c'est une erreur. C'est un retour en arrière - beaucoup de collègues parlent d'une salafisation de la théologie islamique. C'est exactement ce que fait aussi ISIS : ils font revivre l'histoire, et ainsi crééent leurs propres fondements.

SO : Qui donc doit interpréter le Coran de façon actuel ?

A: Je ne veux pas paraître arrogant ou euro-centrique, mais une chose est claire : dans un pays où la liberté ne règne pas, on ne peut réformer de religion. Ce serait jouer avec le feu. Pour cette raison il n'y a qu'en Occident que ce présentera cette occasion, parce que nous pouvons penser et faire de la recherche en toute liberté, malgré les difficultés. Cette liberté est pour nous musulmans une chance.

SO : Etes vous aussi persuadé que l'islam appartient à l'Allemagne ?

A: Oui, mais de nombreux musulmans ont encore beaucoup de mal avec la vie en Europe. Ils ne peuvent pas encore s'identifier avec les comportements locaux. La question si les musulmans peuvent s'identifier à l'Allemagne est pour moi bien plus importante que de savoir si l'islam appartient à l'Allemagne.

SO : Il y a pourtant des millions de musulmans qui vivent en Allemagne, qui se sont insérés ici. Est-ce que vous ne pensez pas que telles déclarations puissent nourrir des ressentiments hostiles, comme on a pu le voir avec le mouvement Pediga ?

A: L'islam est représenté en Allemagne par des institutions qui sont complètement contrôlées de l'étranger. Ils ne représentent pas de loin tous les musulmans. Nous devons former et montrer beaucoup plus un islam  européen, et qui naturellement appartienne à l'Allemagne. Quand les gens disent "l'islam n'est pas d'ici", on doit se demander si les musulmans intégrés sont véritablement inclus. Les partis de droite ou les mouvements comme Pediga qui argumentent de la sorte ne doivent pas nous empêcher de nous poser les vraies questions. L'islam est ma croyance, et je pense que nous devons gérer les problèmes actuels nous mêmes.

SO: Et vous pensez qu'à la fin on pourra aussi rire de l'islam ?

A: Bien sûr que pouvez (en) rire. Ce qui est possible dans un état de droit doit aussi l'être pour l'islam. Les musulmans rient du christianisme et de judaïsme, pourquoi devrait-il y a voir une exception pour l'islam ? Il  a déjà à présent beaucoup de rires - il y a des centaines de plaisanteries en Turquie sur les imams [NDT on distinguera le clergé de la religion - ce n'est pas tout à fait pareil...].

SO: Etes-vous d'accord avec les caricatures de Mahomet ?

Aslan: On peut rire du prophète, mais on ne doit pas le diffamer. En dehors de cela, nous ne pouvons attendre de tout le monde qu'il reconnaisse le prophète et le respecte, comme le font les musulmans. C'est ce qui différencie les musulmans des non-musulmans. L'idée que tout le monde devrait le vénérer  comme nous le faisons est une mauvaise attitude. Nous devons corriger cela.

 

* Voir par exemple cet autre article du Spiegel.

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