Pour se rendre compte de l'absurdité de la position allemande, il faut se référer aux statistiques de la zone euro. L'ensemble affiche un taux de chômage de 8.9% alors que celui de l'Allemagne est de 3.6%. Il y a donc une déconnection forte entre la moyenne de l'ensemble et la position du plus puissant de ses membres. Dans un tel cas, la question est de savoir si la stratégie économique de la zone euro doit être dessinée en fonction des intérêts de Berlin ou en fonction de l'intérêt général. Soit c'est l'intérêt général et la BCE doit poursuivre son action monétaire, ce à quoi l'Allemagne s'oppose, soit c'est l'objectif de Berlin qui doit être respecté et la BCE doit arrêter. Et nous avons ici le parfait exemple du dysfonctionnement structurel de la zone euro. Faut-il accepter servilement la poursuite de l'intérêt du plus fort, ou faut-il tenter de rééquilibrer la situation au profit de l'intérêt général ? Si le soutien donné par la BCE à l'économie de la zone euro est arrêté, quelles sont les leçons que la Grèce (21% de taux de chômage), l'Espagne (16.7%), l'Italie (11.1%), et la France (9.7%) devront en tirer ? Que leurs intérêts ne sont pas ceux défendus au sein de la zone euro.
Comment en est-on arrivé à une situation où l'intérêt général de la zone euro ne semble pas être la priorité de tous ? De cette question en découle une autre, plus curieuse encore, comment expliquer que la France, l'Espagne, ou l'Italie semblent accepter la perpétuation, au sein de la zone euro, d'une politique orientée vers l'intérêt du plus fort de ses membres, à leur détriment. Parce que techniquement parlant, les outils sont en grande partie à disposition. Et il faut saluer le rôle joué par Mario Draghi depuis la fin 2011, qui est parvenu à rééquilibrer, mais en partie seulement, une situation de déséquilibre flagrant