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  • Leçon de l'an Mil

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    Thierry d'Amorbach a vécu aux alentours de l'an Mil à l'abbaye de Fleury, à Saint-Benoit sur Loire, sous la direction d'Abbon. Thierry, né en Allemagne vers 950,
    fait suite à une requête de l'évêque Bernward d'Hildesheim lui demandant des indications sur la vie monastique. Il lui envoie une missive décrivant les règles en cours au sein de son monastère (Le coutumier de Fleury). Ou comment en quelques lignes vaporiser les fantasmes sur le Moyen-Âge.

     

     

     

     

    De la gouvernance et de la bonne manière de servir :
    L'abbé : "Conformément à l'Evangile, il s'efforce toujours de se faire le plus petit parmi les frères, alors qu'il est le premier de tous. Il ne possède rien en propre et n'a rien de plus que les autres, sinon son bâton pastoral et le fardeau de l'autorité. Enfin, pour ce qui est de la nourriture, de la boisson ou du vêtement, il n'a rien de meilleur ni de plus riche que n'importe quel novice illettré, et, si on le lui permettait, il utiliserait plutôt ce qu'il y a de moins bon."

     

    De la considération de l'activité intellectuelle à cette époque :
    L'armarius : "Il garde avec soin la bibliothèque ou local des livres. Il jouit d'une grande considération parmi les frères. Il  classe lui-même, ou confie au soin d'un de ses disciples, les baux à ferme ou les contrats d'échange. C'est à lui qu'incombe le soin des livres et de tout l'équipement du scriptorium. Il est aussi directeur de l'école. 

     

    De l'hygiène :
    Le camérier : Il doit veiller avec soin sur tous les frères du dernier au premier et leur fournir, selon les possibilités du lieu, des vêtements convenables en rapport avec leur rang et leur âge, sans donner aucune occasion de murmures.
    Le camérier doit regarder avec attention ce qu'il y a sur les tables  du dortoir, et lorsqu'il s'y trouve quelque vêtement ou chaussure d'un frère , il doit se hâter de le donner à recoudre à ses serviteurs, si du moins la réparation en vaut la peine. On ne voit jamais, en effet, les moines de la Gaule porter des vêtements rapiécés ou usagés, car leur pays est si abondamment doté de toutes sortes de richesses qu'il leur paraîtrait honteux d'avoir des vêtements sales et usés. Ils ne font pas cela par luxe ou volupté, mais plutôt en action de grâce, par bienséance et honnêteté comme l'homme doit avoir intérieurement le coeur pur.
    Le camérier doit aussi prendre soin de tout ce qui concerne la propreté : il s'occupe du savon et fournit les vases nécessaires. Il fait chauffer les bains pour les malades quand il le juge opportun. Pour la communauté, la coutume est de faire la rasure et la tonsure et de changer de vêtements tous les quinze jours. Les frères ne se baignent pas en commun comme font les séculiers, mais séparément et discrètement dans des cuves entre lesquelles on a tendu des rideaux. C'est au chapitre que, sur l'ordre de l'abbé, ils [les moines] reçoivent chacun du camérier des rasoirs, des peignes avec leur écrins, des couteaux avec leurs gaines, du savon en boîte et tout ce qui est nécessaire.

     

    Du social :
    L'hôtelier des pauvres : A l'entrée du monastère se trouve, conformément à la règle, un hospice pour les pauvres où il y a toujours la literie nécessaire, et du feu pour chauffer l'eau avec laquelle on lave les pieds, et pour réconforter les malheureux transis de froid.
    Il se tient en observation aux portes du monastère et lorsqu'ill voit un pauvre frapper à la porte ou demander l'aumône, immédiatement il se lève avec joie et répond "Deo gratias". Dès qu'il a ouvert la porte, il se prosterne de tout son long comme il le ferait devant le Christ, et non seulement il introduit à l'hôtellerie le nouvel arrivant, mais il va même jusqu'à l'entraîner de force, comme l'évangile le dit : "et ils les contrainrent d'entrer" (Lc 14:23). Puis, après lui avoir lavé les pieds, il met la table et comme un humble serviteur il offre avec largesse et charité tout ce dont les frères disposent. C'est en effet chez nous une coutume bien établie et inviolable, de ne jamais servir aux hôtes et pélerins les aliments ordinaires des serviteurs, mais de leur donner largement ce qui vient de la table des frères.
    Lorsque les pauvres se sont copieusement restaurés, on remplit leurs gourdes de vin à emporter (...) et s'ils ont besoin de vêtements ou de chaussures, l'hôtelier appelle le camérier pour que celui-ci sache ce qu'il faut donner.

     

    De la restauration :
    Le réfectorier : il veille sur le réfectoire et conserve tous les ustensiles en un lieu soigneusement fermé. Il nettoie les table chaque jour, il les recouvre de nappes, (...) il met à chacun une cuillère, il verse le vin dans les coupes qu'ils appellent justitiae, il place les assiettes et donne à chacun la sienne. (...) Il apporte et verse pour les frères du vin pur ou bien épicé, ce qu'ils appellent le clarum, ou encore arômatisé aux herbes, à l'hysope ou au miel, ce qu'ils appellent la vasleda.
    Il étend sur le sol des tapis, il met sur les tables des assiettes propres, il nettoie les carafes. 

     

    Voilà qui traduit bien l'obscurantisme du Moyen-Âge et sa peur panique de l'an Mil - celle-là même qui n'existe que dans les fantasmes de nos contemporains...

    In L'ABBAYE de FLEURY en l'an Mil au temps de saint Abbon, renaissance de Fleury, juin 2004

  • La religion de la paix et de la tolérance - II

    "Dans l'institution religieuse islamique, la guerre sainte (jihâd) est une prescription religieuse en raison de l'universalité de l'appel en vue d'amener la totalité des hommes à l'islam de gré ou de force. C'est pourquoi le califat et la souveraineté temporelle (mulk) y ont été établis de telle façon que ceux qui en ont la charge puissent exercer leur force dans les deux domaines à la fois

    Pour les autres institutions religieuses, leur mission/appel n'y est pas universelle, pas plus que la guerre sainte n'y esy prescrite, sauf seulement pour se défendre. Celui donc qui y est en charge de religion (dîn) ne s'occupe en rien des affaires politiques. La souveraineté temporelle échoit seulement à quelqu'un de façon accidentelle et pour des raisons autres que religieuses, c'est-à-dire en vertu des exigence de l'esprit de corps qui porte naturellement à rechercher le pouvoir.

    Il ne sont pas chargés, en effet, de se rendre maître des nations comme c'est le cas dans l'institution religieuse islamique. Il est seulement requis d'eux qu'ils observent leur religion en privé." 

    Ibn Khaldoun (1332-1406), Muqaddima, III chap.33, cité par Alfred-Louis de Prémare in "Les fondations de l'islam"