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Tue-mouches

Les écrits de Nietzsche sont comme ces longs rubans attrape-mouches couleur de merde, qui pendouillent aux plafonds suifeux des masures campagnardes. Se prennent donc dans ces filaments poisseux les mouches charmées par l'insubstance de même couleur - ou par l'odeur sulfureuse.

Tuez Dieu, ils adoreront un âne. Il faut voir alors comment ces gens qui ont tout perdu se collent à Nietzsche par énergie et désespoir de cause. Voyez donc comment ils défendent leur idole : il suffit d'affirmer sur Nietzsche pour les voir s'agiter et vrombir de toutes leurs petites ailes pathétiques. Dites : "Nieztsche est amoral". Ah ! Offuscation ! Air indigné  ! Mains qui se tordent, têtes qui se couvrent de cendre et les corps de sacs ! Horreur de l'abomination ! Passé l'épuisement de l'agitation, les doctes haussent leurs sourcils, s'épongent, soupirent, ajustent leur pince-nez, et d'un ton  aigrillard vous disent : "cher ami, vous ne comprenez rien à Nieztsche, retournez sur les bancs d'une fac de philo et revenez nous voir." Ou, s'ils daignent quand même vous instruire, pauvres hères que nous sommes, ils vous sortent un raisonnement qui laisserait un jésuite pantois et un alchimiste hurler à la sorcellerie.

Première erreur de ces Nietzschologues, ils sont persuadés que Nietzsche peut s'enseigner. Comme du Kant ou du Schopenhauer. Or, pour trois ou quatre intuitions, il est impossible d'enseigner Nietzsche, à moins de passer pour ces sophistes faussaires qui affirmaient pouvoir enseigner la vertu contre rétribution.
- première intuition : la fac est un lieu de masse, de la plèbe (nous n'y voyons aucun inconvénient), et Nietzsche s'adresse à l'aristocrate.
- la deuxième intuition est que Nietzsche exige la probité, chose impossible dans une fac de philo (en  vertu de l'intuition précédente). On essaiera à coup sûr de rendre sa philosophie acceptable : on arrondira les angles, on exégètera modérément, on herméneutiquera de même, on se gardera de l'excès - comme tout bon philosophe qui connait ses oracles - mais on y enseignera donc point Nietzsche.
- la troisième c'est que Nietzsche ne s'enseigne pas, il se sent. On rencontre Nietzsche de la même façon que deux chiens se rencontrent dans la rue.
- la quatrième, c'est que Nietzsche ne voulait pas être compris, en cohérence avec les deux points précédents. Il voulait être cru, ou senti.
C'est ainsi que Nietzsche voulait égarer les gens sérieux,  les âmes roturières. Je parle ici on l'aura compris de ces Nietzschologues, de ceux qui font de Nieztsche un placement.
Les Nazis, en bons chiens enragés, n'ont senti que le nauséabond de son derrière-cuisine. "Deviens ce que tu es", disait Nietzsche dans "Par delà Bien et mal". Lui devint et fut légume, et les Nazis enragés.

La deuxième erreur, et non la moindre, ces doctes prennent Nietzsche au sérieux. Or Nietzsche n'est qu'une vaste blague, seulement trop vaste pour tenir sur un papier Carambar. Nietzsche est un éclat de rire, celui du facétieux qui, échangeant les poteaux indicateurs, faussant les boussoles, s'amuse au spectacle du niais errant (celui qui croit tout ce qu'on lui dit du moment que "Dieu" n'est pas prononcé).

Troisième erreur de ces Nietzschologues, qui découle des deux précédentes : ils s'évertuent à rendre raison de Nietzsche. Or il n'y a rien de plus étranger à la raison que les écrits de Nietzsche. Nietzsche se montre, mais ne se démontre pas.

En résumé, si vous voyez de ces gens aux airs anachorètes, qui prétendent vous faire la leçon sur Nietzsche, ou tentent d'en rendre raison, prenez place au côté du moustachu qui se bidonne sur son banc, et bidonnez-vous de concert.

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