Montesqieu écrivait : "Il est parfois nécessaire de changer certaines lois, mais le cas est rare, et lorsqu'il arrive, il ne faut y toucher que d'une main tremblante". La main du législataire actuelle tremble tellement souvent qu'on la penserait atteinte d'une maladie grave. Elle l'est de fait. Il s'agit de la maladie de ceux qui pensent que la nature doit se plier à la loi. "Une chose n'est pas juste parce qu'elle est loi ; mais elle doit être loi parce qu'elle est juste", écrivait encore Montesqieu.
En réponse au délire post-moderne du nouveau mariage en gestation, voici pour quelles raisons la future loi est inique, injuste et donc illégitime.
1) Il n'appartient à un Etat de légiférer sur le dictionnaire * : cf TLFI, dont on rappellera qu'il est une émanation de l'Académie française.
MARIAGE, subst. masc.
A. 1. a) Union d'un homme et d'une femme, consacrée par un ensemble d'actes civils ou parfois religieux et destinée à la fondation d'une famille.
2) Dans la même perspective, il n'appartient pas à l'Etat français de changer les termes d'un mot dont la signification est l'une des plus universelles qui soit. Le mariage a toujours, partout et par tous, dans tous les âges et toutes les cultures, été défini, quand il existait, comme l'union d'un homme et d'une femme, et jamais autre chose. Cf Claude Levi-Strauss. Cf Déclaration Universelle des Droits de l'Homme de 1948, art.16 :
1. A partir de l'âge nubile, l'homme et la femme [on notera l'article défini singulier et la conjonction de coordination], sans aucune restriction quant à la race, la nationalité ou la religion, ont le droit de se marier et de fonder une famille. Ils ont des droits égaux au regard du mariage, durant le mariage et lors de sa dissolution.
2. Le mariage ne peut être conclu qu'avec le libre et plein consentement des futurs époux.
3. La famille est l'élément naturel et fondamental de la société et a droit à la protection de la société et de l'Etat.
3) "L'égalité" devant le mariage ne saurait être un argument en faveur du "mariage" ouvert aux homosexuels. Couple homosexuel et couple hétérosexuel ne sont pas de même nature : l'un est par définition fermé à la fécondité (sauf à faire appel à un tiers), tandis que l'autre y est, sauf accident, ouvert. Nous parlons donc de deux choses fondamentalement, structurellement différentes : l'un des couples est autonome, l'autre non. Partant, parler d'égalité n'a, dans le contexte du mariage, rigoureusement aucune pertinence : cela revient simplement à insulter à la fois la nature et la raison.
D'autre part le mariage actuel n'est pas fermé aux homosexuels. Un homosexuel peut parfaitement se marier. Avec une femme. Et vice-versa. Il n'y a donc pas, stricto-sensu, de discrimination.
4) Le mariage n'est pas la reconnaissance publique de l'affection que se portent des individus entre eux. Le mariage civil n'a pas d'autres finalités et raison d'être que l'enfant, futur de la société. Le mariage civil est à ce titre un contrat entre la société, le futur couple (cf point 2), et les éventuels enfants issus du couple, justifié par le besoin de perpétuation de la société en assurant le renouvellement des générations. La société reconnaît ainsi que, le temps que l'enfant soit pleinement autonome, il est de d'un intérêt bien compris entre les partis de lui offrir un cadre juridique lui offrant un maximum de protection et stabilité. Le mariage civil est donc la rencontre entre une aspiration naturelle individuelle (fonder un foyer) et un bien commun, qui se confond ici avec l'intérêt général.
Le mariage civile n'est en aucun cas la reconnaissance publique d'un quelconque degré d'affection entre deux personnes. En conséquence, le "mariage" de couples homosexuels, par définition fermés à la fécondité, ne sert pas le bien commun, et par là n'a pas à recevoir la bénédiction de l'Etat.
5) Le mariage homosexuel détruit la notion juridique de filiation. "Tout mariage est une rencontre dramatique entre la nature et la culture, entre l'alliance et la parenté" (Claude Lévi-Strauss, Les Structures élémentaires). Le pseudo-mariage ouvert aux homosexuels efface de facto la réalité parentale qui est simplement que, chez les mammifaires placentaires, la reproduction est sexuée et donc que le nouveau né a obligatoirement une double origine mâle/femelle. Ainsi, la notion de père et de mère disparaît-elle pour être remplacée par une notion orwellienne et comptable de "parent #1" et "parent #2". Il s'agit ici d'une régression sociétale absolument inouïe, où la nature et le droit d'un enfant de connaître sa double origine, et de vivre avec son père et sa mère biologiques, sont bafoués avec une rare impudence.
Où l'on voit comment le caprice d'un groupuscule arrive à contraindre et impacter une société tout entière. Ceci par la grâce d'une escroquerie intellectuelle qui poserait qu'en définitive, tout est culture et rien que culture. La nature est ainsi écartée d'un revers de main, étant vue comme hostile et obstacle à l'accomplissement du désir. Parmi ces escrocs, que des écologistes crachent ainsi à se point sur la nature en dit long sur leur honnêteté.
Cette infection du post-modernisme n'est en vérité qu'un neo-gnosticisme ; une haine du corps tel que la nature l'a conçu, vue comme un obstacle à une vision dévoyée de la liberté.
6) L'intérêt de l'enfant doit primer avant toute chose. Le droit à l'enfant n'existe pas. En revanche un enfant à le droit de vivre avec son père et sa mère biologique, sauf accident. Le fait que des situations existent dans lesquelles l'enfant ne vit pas avec son père et/ou sa mère ne crée pas des normes pour autant, seulement des accidents; en d'autres termes une situation ne fait pas une norme. Ce sont précisément des situations anormales que la loi ne saurait rendre normales sans causer un grave préjudice à l'enfant. Un moindre mal ne sera jamais un meilleur ; et seul ce qui est le meilleur pour l'enfant doit faire la norme.
Il existe une grande différence entre subir un aléa et le provoquer, de même qu'un feu de forêt causé par un orage n'excuse pas le pyromane. Une chose est de subir, une autre de provoquer sciemment. L'adoption ne peut donc être qu'un pis-aller et non un paradagime ; en faire une norme serait en tous cas criminel et ferait gravement violence à l'enfant programmé pour l'adoption et privé de son droit à vivre et être éduqué par son père et par sa mère. En bref, il y a une différence essentielle entre devenir orphelin et créer des orphelins.
7) Il n'est pas nécessaire de spéculer sur les répercussions néfastes que peut avoir sur l'enfant une éducation qui n'est pas le fait de ses deux parents biologiques. Les études menées en Grande-Bretagne montrent bien que les enfants de famille mono-parentale ou re/décomposée sont statistiquement beaucoup plus touchés par l'échec scolaire, l'alcool, la drogue, la criminalité. Le coût social est simplement exhorbitant **; on ne touche pas à la double origine d'un être humain impunément, et on ne peut pas faire comme si freud n'avait jamais existé.
8) On objectera qu'il existe plusieurs formes de cohabitations ; de même que dans d'autres sociétés, l'enfant n'est pas obligatoirement amener à vivre avec son père et sa mère.
-> ce n'est pas parce qu'il existe plusieurs façons d'élever les futurs citoyens/sociétaires que l'une n'est pas meilleure que les autres, et s'approche plus de la vérité anthropologique que les autres. D'autre part ce qui peut s'appliquer à des sociétés "simples" n'est souvent pas applicable à des sociétés complexes comme en Occident.
9) Détruire la définition traditionnelle du mariage ouvre la voie à une logique sans fin : à quel titre le mariage serait-il arbitrairement limité à deux personnes ? Pourquoi l'interdire aux personnes déjà mariés par ailleurs ? aux personnes parents aux premiers degrés ? La destruction de la définition traditionnelle du mariage est donc en porteuse d'une régression civilisationnelle, irréversible. L'on voit bien ici que changer la définition du mariage pour une question de genre, revient à vider ce terme de toute sa substance et ouvre la voie au grand n'importe quoi.
10) La redifinition du mariage, choix de civilisation, sera irréversible. Elle créera des cas tels qu'il sera simplement impossible de revenir en arrière ; aucune démocratie n'aura la force et la capacité de de le faire, et la seule issue sera une sorte de fuite en avant.
En résumé : le mariage homosexuel repose sur un mensonge : celui qui dit faussement et sans pudeur que l'homme n'est que culture, qu'il n'y a pas de différences entre un couple homosexuel et un couple homme/femme. Il contraint et prend en otage la société tout entière en reniant la notion élémentaire et objective de père et mère au profit de la vaporeuse notion de "parentalité" ; irréversible et affaiblissant encore plus la notion de mariage, il sape davantage l'un des piliers des sociétés modernes et civilisées. Il détruit la filiation. Loin de ne concerner que l'intérêt de deux individus, c'est donc toute la société qui est touchée et infectée par ce coup de force d'apprentis théoriciens ; les mêmes qui depuis quarante ans se sont acharnés avec une rage obstinée à saper tous les fondements. Les échecs retentissants passés ne découragent apparemment ni ses agents mortifères, ni les idiots utiles qui les servent.
Ces agents sont les personnages possédés de Dostoïevski : ils ne sont motivés que par une pulsion nihiliste de destruction du présent, et la (re)construction n'est pas leur problème. Ou pour prendre une citation d'un film d'un récent : "Some men aren't looking for anything logical. Some men just want to watch the world burn."
* Le mariage, c'est encore Lionel Jospin qui en parle le mieux :
« Le mariage est, dans son principe et comme institution, l’union d’un homme et d’une femme. Cette définition n’est pas due au hasard. Elle renvoie non pas d’abord à une inclinaison sexuelle, mais à la dualité des sexes qui caractérise notre existence et qui est la condition de la procréation et donc de la continuité de l’Humanité. On peut respecter la préférence amoureuse de chacun sans automatiquement institutionnaliser les mœurs. » JDD, 16 mai 2004
** Nos sociétés moribondes ne tiennent que parce qu'elles sont shootées et colmatées à coups de centaines de milliards ; d'un côté elles promeuvent des artificiers névrosés de la dynamite, de l'autre elles s'étonnent des dégâts. Comme disait Bossuet : "Dieu se rit des hommes qui se plaignent des conséquences alors qu'ils en chérissent les causes."