Quoi de plus pathétiques que tous ces combattants orphelins de causes, abandonnés sur leur île déserte ? Leur guerre est terminée depuis belle lurette mais ils le nient férocement. Ils s'escriment à présent contre des moulins à vent. Leurs vociférations sonnent dans le vide, leurs gesticulations font pantomine. Ils moulinent dans une masse sourde de leur perpétuel et invariable tintatamarre.
Ils sont usés, râpés, élimés ; leur discours est une bastide croulante, leurs mots des pointes effritées. Ils envoient à deux pieds, ils ne risquent plus de blesser qu'eux-mêmes.
Chez eux tout est grippé, corrodé, tétanisé. Tout grince, geint, ou crisse. La poudre sent le mouillé, leurs balles mêmes sont rouillées ; elles ne tuent plus que par inadvertance, et par tétanos.
Ils sont pathétiques. Ils ont besoin d'une décharge, d'un ministère, celui des orphelins de causes.