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Aius Locutius - Page 38

  • Rousseau et l'athéisme

    Mon fils, tenez votre âme en état de désirer toujours qu’il y ait un Dieu, et vous n’en douterez jamais. Au surplus, quelque parti que vous puissiez prendre, songez que les vrais devoirs de la religion sont indépendants des institutions des hommes ; qu’un cœur juste est le vrai temple de la Divinité ; qu’en tout pays et dans toute secte, aimer Dieu par-dessus tout et son prochain comme soi-même, est le sommaire de la loi ; qu’il n’y a point de religion qui dispense des devoirs de la morale ; qu’il n’y a de vraiment essentiels que ceux-là ; que le culte intérieur est le premier de ces devoirs, et que sans la foi nulle véritable vertu n’existe.

    Fuyez ceux qui, sous prétexte d’expliquer la nature, sèment dans les cœurs des hommes de désolantes doctrines, et dont le scepticisme apparent est cent fois plus affirmatif et plus dogmatique que le ton décidé de leurs adversaires. Sous le hautain prétexte qu’eux seuls sont éclairés, vrais, de bonne foi, ils nous soumettent impérieusement à leurs décisions tranchantes, et prétendent nous donner pour les vrais principes des choses les inintelligibles systèmes qu’ils ont bâtis dans leur imagination. Du reste, renversant, détruisant, foulant aux pieds tout ce que les hommes respectent, ils ôtent aux affligés la dernière consolation de leur misère, aux puissants et aux riches le seul frein de leurs passions ; ils arrachent du fond des cœurs le remords du crime, l’espoir de la vertu, et se vantent encore d’être les bienfaiteurs du genre humain. Jamais, disent-ils, la vérité n’est nuisible aux hommes. Je le crois comme eux, et, c’est, à mon avis, une grande preuve que ce qu’ils enseignent n’est pas la vérité [1].

     

    1. Si l’athéisme ne fait pas verser le sang des hommes *, c’est moins par amour pour la paix que par indifférence pour le bien : comme que tout aille, peu importe au prétendu sage, pourvu qu’il reste en repos dans son cabinet. Ses principes ne font pas tuer les hommes, mais ils les empêchent de naître, en détruisant les mœurs qui les multiplient, en les détachant de leur espèce, en réduisant toutes leurs affections à un secret égoïsme, aussi funeste à la population qu’à la vertu. L’indifférence philosophique ressemble à la tranquillité de l’État sous le despotisme ; c’est la tranquillité de la mort : elle est plus destructive que la guerre même.
    Par les principes, la philosophie ne peut faire aucun bien que la religion ne le fasse encore mieux, et la religion en fait beaucoup que la philosophie ne saurait faire.

    Par la pratique, c’est autre chose ; mais encore faut-il examiner. Nul homme ne suit de tout point sa religion quand il en a une : cela est vrai ; la plupart n’en ont guère, et ne suivent point du tout celle qu’ils ont : cela est encore vrai ; mais enfin quelques-uns en ont une, la suivent du moins en partie ; et il est indubitable que des motifs de religion les empêchent souvent de mal faire, et obtiennent d’eux des vertus, des actions louables, qui n’auraient point eu lieu sans ces motifs.
    (...)

    Nos gouvernements modernes doivent incontestablement au christianisme leur plus solide autorité et leurs révolutions moins fréquentes ; il les a rendus eux-mêmes moins sanguinaires : cela se prouve par le fait en les comparant aux gouvernements anciens. La religion mieux connue, écartant le fanatisme, a donné plus de douceur aux mœurs chrétiennes. Ce changement n’est point l’ouvrage des lettres ; car partout où elles ont brillé, l’humanité n’en a pas été plus respectée ; les cruautés des Athéniens, des Égyptiens, des empereurs de Rome, des Chinois, en font foi. Que d’œuvres de miséricorde sont l’ouvrage de l’Évangile ! Que de restitutions, de réparations, la confession ne fait-elle point faire chez les catholiques ! Chez nous combien les approches des temps de communion n’opèrent-elles point de réconciliations et d’aumônes ! Combien le jubilé des Hébreux ne rendait-il pas les usurpateurs moins avides ! Que de misères ne prévenait-il pas ! La fraternité légale unissait toute la nation : on ne voyait pas un mendiant chez eux. On n’en voit point non plus chez les Turcs, où les fondations pieuses sont innombrables ; ils sont, par principe de religion, hospitaliers, même envers les ennemis de leur culte.

    (...)

    Philosophe, tes lois morales sont fort belles ; mais montre-m’en, de grâce, la sanction.

    Rousseau, l'Emile, vol II livre IV.

     

    * Le démenti du XX° est cruel. 

  • Leçon de l'an Mil

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    Thierry d'Amorbach a vécu aux alentours de l'an Mil à l'abbaye de Fleury, à Saint-Benoit sur Loire, sous la direction d'Abbon. Thierry, né en Allemagne vers 950,
    fait suite à une requête de l'évêque Bernward d'Hildesheim lui demandant des indications sur la vie monastique. Il lui envoie une missive décrivant les règles en cours au sein de son monastère (Le coutumier de Fleury). Ou comment en quelques lignes vaporiser les fantasmes sur le Moyen-Âge.

     

     

     

     

    De la gouvernance et de la bonne manière de servir :
    L'abbé : "Conformément à l'Evangile, il s'efforce toujours de se faire le plus petit parmi les frères, alors qu'il est le premier de tous. Il ne possède rien en propre et n'a rien de plus que les autres, sinon son bâton pastoral et le fardeau de l'autorité. Enfin, pour ce qui est de la nourriture, de la boisson ou du vêtement, il n'a rien de meilleur ni de plus riche que n'importe quel novice illettré, et, si on le lui permettait, il utiliserait plutôt ce qu'il y a de moins bon."

     

    De la considération de l'activité intellectuelle à cette époque :
    L'armarius : "Il garde avec soin la bibliothèque ou local des livres. Il jouit d'une grande considération parmi les frères. Il  classe lui-même, ou confie au soin d'un de ses disciples, les baux à ferme ou les contrats d'échange. C'est à lui qu'incombe le soin des livres et de tout l'équipement du scriptorium. Il est aussi directeur de l'école. 

     

    De l'hygiène :
    Le camérier : Il doit veiller avec soin sur tous les frères du dernier au premier et leur fournir, selon les possibilités du lieu, des vêtements convenables en rapport avec leur rang et leur âge, sans donner aucune occasion de murmures.
    Le camérier doit regarder avec attention ce qu'il y a sur les tables  du dortoir, et lorsqu'il s'y trouve quelque vêtement ou chaussure d'un frère , il doit se hâter de le donner à recoudre à ses serviteurs, si du moins la réparation en vaut la peine. On ne voit jamais, en effet, les moines de la Gaule porter des vêtements rapiécés ou usagés, car leur pays est si abondamment doté de toutes sortes de richesses qu'il leur paraîtrait honteux d'avoir des vêtements sales et usés. Ils ne font pas cela par luxe ou volupté, mais plutôt en action de grâce, par bienséance et honnêteté comme l'homme doit avoir intérieurement le coeur pur.
    Le camérier doit aussi prendre soin de tout ce qui concerne la propreté : il s'occupe du savon et fournit les vases nécessaires. Il fait chauffer les bains pour les malades quand il le juge opportun. Pour la communauté, la coutume est de faire la rasure et la tonsure et de changer de vêtements tous les quinze jours. Les frères ne se baignent pas en commun comme font les séculiers, mais séparément et discrètement dans des cuves entre lesquelles on a tendu des rideaux. C'est au chapitre que, sur l'ordre de l'abbé, ils [les moines] reçoivent chacun du camérier des rasoirs, des peignes avec leur écrins, des couteaux avec leurs gaines, du savon en boîte et tout ce qui est nécessaire.

     

    Du social :
    L'hôtelier des pauvres : A l'entrée du monastère se trouve, conformément à la règle, un hospice pour les pauvres où il y a toujours la literie nécessaire, et du feu pour chauffer l'eau avec laquelle on lave les pieds, et pour réconforter les malheureux transis de froid.
    Il se tient en observation aux portes du monastère et lorsqu'ill voit un pauvre frapper à la porte ou demander l'aumône, immédiatement il se lève avec joie et répond "Deo gratias". Dès qu'il a ouvert la porte, il se prosterne de tout son long comme il le ferait devant le Christ, et non seulement il introduit à l'hôtellerie le nouvel arrivant, mais il va même jusqu'à l'entraîner de force, comme l'évangile le dit : "et ils les contrainrent d'entrer" (Lc 14:23). Puis, après lui avoir lavé les pieds, il met la table et comme un humble serviteur il offre avec largesse et charité tout ce dont les frères disposent. C'est en effet chez nous une coutume bien établie et inviolable, de ne jamais servir aux hôtes et pélerins les aliments ordinaires des serviteurs, mais de leur donner largement ce qui vient de la table des frères.
    Lorsque les pauvres se sont copieusement restaurés, on remplit leurs gourdes de vin à emporter (...) et s'ils ont besoin de vêtements ou de chaussures, l'hôtelier appelle le camérier pour que celui-ci sache ce qu'il faut donner.

     

    De la restauration :
    Le réfectorier : il veille sur le réfectoire et conserve tous les ustensiles en un lieu soigneusement fermé. Il nettoie les table chaque jour, il les recouvre de nappes, (...) il met à chacun une cuillère, il verse le vin dans les coupes qu'ils appellent justitiae, il place les assiettes et donne à chacun la sienne. (...) Il apporte et verse pour les frères du vin pur ou bien épicé, ce qu'ils appellent le clarum, ou encore arômatisé aux herbes, à l'hysope ou au miel, ce qu'ils appellent la vasleda.
    Il étend sur le sol des tapis, il met sur les tables des assiettes propres, il nettoie les carafes. 

     

    Voilà qui traduit bien l'obscurantisme du Moyen-Âge et sa peur panique de l'an Mil - celle-là même qui n'existe que dans les fantasmes de nos contemporains...

    In L'ABBAYE de FLEURY en l'an Mil au temps de saint Abbon, renaissance de Fleury, juin 2004

  • La religion de la paix et de la tolérance - II

    "Dans l'institution religieuse islamique, la guerre sainte (jihâd) est une prescription religieuse en raison de l'universalité de l'appel en vue d'amener la totalité des hommes à l'islam de gré ou de force. C'est pourquoi le califat et la souveraineté temporelle (mulk) y ont été établis de telle façon que ceux qui en ont la charge puissent exercer leur force dans les deux domaines à la fois

    Pour les autres institutions religieuses, leur mission/appel n'y est pas universelle, pas plus que la guerre sainte n'y esy prescrite, sauf seulement pour se défendre. Celui donc qui y est en charge de religion (dîn) ne s'occupe en rien des affaires politiques. La souveraineté temporelle échoit seulement à quelqu'un de façon accidentelle et pour des raisons autres que religieuses, c'est-à-dire en vertu des exigence de l'esprit de corps qui porte naturellement à rechercher le pouvoir.

    Il ne sont pas chargés, en effet, de se rendre maître des nations comme c'est le cas dans l'institution religieuse islamique. Il est seulement requis d'eux qu'ils observent leur religion en privé." 

    Ibn Khaldoun (1332-1406), Muqaddima, III chap.33, cité par Alfred-Louis de Prémare in "Les fondations de l'islam"

  • The best of post-modernism

    In the Netherlands,” continues Dr Morgan [a sociologist specialising in family policy today], “to be equal they opened up civil partnerships to heterosexuals as well as to gays but then found that there were these three-in-a-bed relationships that were seeking legal recognition; I think it is all part of the cause. Once you break away from one man and one woman, what do you expect? Once you allow two men [to marry], where are your boundaries?” Precisely: you haven’t just effected a minor readjustment: you have torn down the walls protecting the institution itself: anything goes. “People say this won’t happen,” she continues, “but where does it stop? You are going to get polygamy from Muslims, aren’t you? People are simply shutting their eyes if they think that this is not going to happen.”

     

    Dr Morgan (who I have written about before in this column) is one of the few sensible sociologists around, and she is a specialist on the family, and particularly on the dire consequences for children of families which are not based on two married parents (of opposite sex): her classic study Marriage-Lite: The Rise of Cohabitation and its Consequences is available from Civitas as a free download.

     

    And she has surely put her finger on the whole point. Marriage is not simply there for the good of those involved. “Part of the problem,” she says, “is the modern view of marriage as a [private relationship] based on subjective definitions of ‘love’. This is to the exclusion of its wider purpose as a public contract serving the common good by supporting the procreation and education of future generations.

    (source Catholic Herald)