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  • Le testament d'un égaré

    rousseau.jpg"Fuyez ceux qui, sous prétexte d'expliquer la nature, sèment dans les coeurs des hommes de désolantes doctrines, et dont le scepticisme apparent est cent fois plus affirmatif et plus dogmatique que le ton décidé de leurs adversaires.  Sous le hautain prétexte qu'eux seuls sont éclairés, vrais, de bonne foi, ils nous soumettent impérieusement à leurs décisions  tranchantes, et prétendent nous donner pour les vrais principes des choses, les inintelligibles systèmes qu'ils ont bâtis dans leur imagination. Du reste, renversant, détruisant, foulant aux pieds tout ce que les hommes respectent, ils ôtent aux affligés la dernière consolation de leur misère, aux puissants et aux riches le seul frein de leurs passions ; ils arrachent du fond des coeurs le remords du crime, l'espoir de la vertu, et se vantent encore d'être les bienfaiteurs du genre humain. Jamais, disent-ils, la vérité n'est nuisible aux hommes. Je le crois comme eux, et c'est, à mon avis, une grande preuve que ce qu'ils enseignent n'est pas la vérité."

     

    Il est clair que l'auteur nous demande ici de fuir le post-rousseauisme de toute notre raison. Car on n'en finit plus de mesurer le désastre de la mise en pratique de cette philosophie criminellement optimiste - les unités nous manquent à dire vrai. Il serait vain de recenser toutes les théories et idéologies de ces quarantes dernières années qui s'en réclament, sans compter toutes celles qui se reconnaîtront dans le portrait (ne va-t-il pas comme une seconde peau à la "théorie du genre", et à tous ces rejetons difformes du progressisme ou modernisme* aux noms trompeurs ?) 

     Triste lot tout de même, qui donne à chacun d'être plus lucide contre son voisin que pour soi-même.

    "Jamais, disent-ils, la vérité n'est nuisible aux hommes. Je le crois comme eux, et c'est, à mon avis, une grande preuve que ce qu'ils enseignent n'est pas la vérité."

    C'est en effet un critère sans nul autre pareil. L'inconvénient est que pour en user et juger du fruit, il faut bien l'avoir eu en main.

    * Constat désabusé d'un apôtre du "modernisme" :
    "Après être entrés en pleine modernité pop avec le plastique, nous devons faire face aux désillusions de la post-modernité : ses dégâts irréversibles, ses problèmes insurmontables nous obligeant à faire des choix tragiques."
    La vérité n'est jamais nuisible aux hommes.

  • Des hommes et Dieu

    MantegnaChristMort.jpg On a beaucoup glosé sur le film de Xavier Beauvois, "Des hommes et des dieux." Inutile donc de s'attarder sur l'objet du film, seulement sur quelques scènes.

    Il y a évidemment la dernière cène, chant du Cygne sur fond sonore du Lac des Cygnes, mise en abîme du film tout entier.

     Il y a aussi une scène scandaleuse, celle où l'on voit un cadre du GIA, un terroriste donc, en un mot un assassin, se faire soigner au monastère. Il est couvert de sang, surtout les mains : on l'a vu égorger un ouvrier croate sur un chantier de sang-froid. On a vu les images des attentats, on a entendu des nouvelles de jeunes filles exécutées pour avoir eu l'indécence de ne pas se voiler. Alors pourquoi soigner et sauver un type qui va sans doute récidiver ? La raison s'y oppose : n'est-ce pas criminel en vérité, et contre la loi ?
     Le plan qui montre le blessé sur son lit d'hôpital, crapule sanglante sous un drap immaculé, esquisse une explication. Le point de vue de la caméra est à peu de chose près le point de vue d'André Mantegna lorsqu'il peignit son "Christ mort" (oeuvre plutôt ratée esthétiquement - qu'importe). Ainsi le moine pose-t-il son regard : il voit le Christ dans chaque homme, fût-il le dernier des larrons. C'est incompréhensible si on ne croit pas que Jesus est Dieu, mort à cause des hommes et de leurs fautes. Le monastère n'est pas la cité des hommes, c'est déjà la cité de Dieu : on ne condamne pas, on sauve ce qui peut-être sauvé. N'empêche...

    L'autre scène marquante est le survol du monastère par un hélicoptère de l'armée. Face à face étourdissant entre cet ange noir, inquiétant, écrasant tout du bruit de sa voilure tournante hurlante, et cette petite église un peu minable, entièrement vulnérable, mais si sereine et paisible. Vacarme contre chant. Intrusion démoniaque, viol de ce hâvre de paix ; image d'une armée censée protéger, mais au final aussi menaçante que les terroristes qu'elle combat (rappel, de fait, que le rôle de l'armée dans l'assassinat des moines de Thibhirines est des plus troubles). Mais les moines ne cédèrent pas à l'intimidation.

  • Delirium tremens, ou le goût amer de l'absinthe

    degas-absinthe.jpg  Ou comment un obscur "pasteur" américain, célèbre parmi ses poules et ses canards mais connu de strictement personne, parvient à menacer la tranquillité du monde par la seule grâce de la loupe médiatique. Voilà une non-personne et un non-évènement entièrement fabriqués, transformés par une alchimie de presse en affaire d'Etat, quand le quidam aurait dû faire l'entre-filet du Florida Alligator Daily News, entre la réunion du club de tricot en point turc et le gagnant du concours de poker des pensionnés de la GM.

    Qu'importe le vin pourvu qu'on ait l'ivresse. L'alcool rend aveugle, l'absinthe rend fou, la presse les deux à la fois. Mais lorsque la presse s'enivre d'un évènement qu'elle a elle-même créé ? Fou celui qui se sert dans son alambic !

    Car enfin, qui ne se ficherait des soirés barbecues d'un sombre cinglé du fin fond de l'amérique des Hillbillies ? La presse. Elle dit : non, on ne se fout pas des barbecues ; les barbecues c'est sacré, et on n'y brûle pas n'importe quoi. C'est qu'on a des principes, monsieur.

    Au fait, pourquoi j'en parle de ce type ? Chienne de vie, qu'est-ce qu'on s'emmerde - patron, la même chose !

  • Les gargouilles

    gargouilles-strasbourg.jpg Il y a des hommes qui n'oeuvrent que pour la destruction de l'homme. Ils sont possédés, pris d'une fureur et d'une rage contre le genre humain. Ce sont des suicidaires trop lâches pour passer à l'acte seuls, ils ont besoin que toute une société les accompagne. Rien est alors trop bête, trop stupide, trop dément pour parvenir à cette fin.

    Pour cette raison, il faut rendre grâce à Mgr Anatrella qui a le courage de se faire le boueux d'idéologies dites post-modernes. On le voit curer avec bravoure toutes les boues d'épuration, vomies des collecteurs d'une société qui ne sait produire que des ordures - ainsi la théorie du genre. Dans n'importe quel système d'égoût, l'on rejette au loin, dans un cul de basse fosse. Mais ici la fiente est réinjectée dans le système vital, comme des gargouilles qui recracheraient au-dedans, et finiraient par noyer le coeur.

    Quant à nous le courage nous manque à l'idée d'affronter de telles gaudrioles. Ils nous provoquent de trop bas. Ils ne sont plus dans la raison. Leur jus est indigeste et par trop acrimonieux, il dissout le suc gastrique. Quoi de plus démoralisant en effet que d'avoir à prouver l'évidence (nous sommes bien réduits à le faire). Voilà sans doute l'exercice intellectuel le plus ingrat, le plus mal payé qui existe. Il faut donc du courage, et le courage physique n'est pas ici la moindre des vertus, tant ceux qui n'ont pas de raisons à faire valoir n'ont plus que la violence à opposer.

    Mais lui prélève patiemment des échantillons, et s'astreint, par une discipline qui ferait pleurer le plus endurci des stylites, à déconstruire patiemment leur déconstruction. Il nous dit : certes, une partie de l'homme est construite avec du culturel, mais prendre cette partie pour le tout, l'erreur est par trop grossière. Il faut nécessairement que ceux qui exposent cette théorie n'y croit pas eux-même, mais soient sûrs de ses effets néfastes.

    Les benêts qui vivent dans la terreur d'être traités d'ennemis du post-modernisme avalent ces âneries sans broncher ; ils en ont avalé d'autres ;  je renvoie aux idiots utiles.

    En revanche le citoyen, que son bon sens préserverait de telles inepties, n'a pas conscience que ces théories bouffonnes sont mises en musique avec beaucoup de sérieux dans leur dos. C'est pourquoi je suggère vivement de lire la série d'interviews de Mgr Anatrella parue sur Zenit.

    Extrait : "Pour certains, l'Église serait généreuse à l'égard des étrangers et des déshérités, et rigide en matière de mœurs (surtout quand on parle du préservatif, de l'homosexualité, du divorce, de l'avortement et de l'eugénisme avec, entres autres, la trisomie 21 quand ce n'est pas l'euthanasie). Elle n'est pas rigide, bien au contraire, elle est libre, lucide et ouverte sur la vie comme l'exige le Christ, puisque c'est toujours au nom du même principe qu'elle intervient et structure sa relation au monde : le respect de la dignité humaine, le respect de l'expression sexuelle qui est une modalité de la relation amoureuse seulement engagée entre un homme et une femme, et le respect de la vie de son commencement à sa fin. Toutes choses contestées, par ailleurs, par la théorie du genre puisque chacun est son propre créateur et pourquoi pas son destructeur et l'exterminateur des vies qui ne sont pas utiles ! Une nouvelle idéologie technocratique et idéaliste tout aussi meurtrissante que les précédentes !"

    On sent bien dans ces idéologies tout le relent vaporeux des théories de Sartre, jusqu'à la nausée. Qu'on nous serve encore le jus insipide de l'intellectuel le plus brillant et le plus fourvoyé du siècle dernier, voilà encore un prodige qui en dit long sur l'état de la raison. Celle-ci n'en finit plus d'agonir depuis la fin du Moyen-Âge.