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Aius Locutius - Page 20

  • L'être et le néant

    vie.jpg Chacun aura au moins l'intuition qu'il y a quelque chose de boiteux et d'inacceptable, dans la démonstration précédente  que la vie n'a pas de réalité et est un pur concept.

    D'un point de vue logique, notons plusieurs choses : ce n'est pas parce qu'une définition est incomplète en l'état de nos connaissances qu'il n'y a pas de prédicats possibles. Par ailleurs la tentative nominaliste de nous refaire le coup de la querelle des universaux est tout bonnement grotesque : La vie est un donné à priori (elle précède la conscience et les sens) en même temps qu'une expérience immédiate ; elle n'a donc pas à être prouvée mais reconnue comme telle. Le terme universel "la vie" a bien une traduction singulière et concrète dans chaque vivant.

     Il y a ici probablement confusion des genres, et donc confusion des catégories : c'est-à-dire que l'auteur, trouble intellectuel bien répandu, cherche à définir physiquement ce qui relève de la méta-physique. L'effort est donc voué à l'échec et à la frustration. S'il fallait définir scientifiquement le temps j'imagine qu'on aboutirait au même résultat stérile.

    Notre pseudo-philosophe est typique des neo-sophistes : ils veulent que la réalité colle au langage ; et si le langage est impuissant à dire la réalité, c'est qu'elle n'existe pas. Magnifique tour de prestidigitation. Il y a une inversion complète de la subordination : le langage doit dire le monde, et non le contrefaire. Nous sommes alors dans une anti-genèse et l'homme s'attribue ce qui revient à Dieu. La Création est oeuvre du Verbe de Dieu exclusivement : Dieu dit et cela est. L'homme s'imagine que son langage possède aussi une vertu opérante, jusqu'à ce qu'il s'aperçoive que les faits sont têtus.

     

    Conclusion : nous proposerons à l'énergumène de prouver (ou non) la réalité de la notion de vie en lui faisant subir lui-même l'expérience du chat de Schrödinger. Néanmoins il est intéressant de constater l'impuissance de la science (pour les raisons données plus haut) à donner une définition complète de la vie ; comme aurait dit Chatov dans "Les Possédés de Dostoïoveski" : "Le secret de l’apparition d’un nouvel être est un grand mystère, M Ferris Jabr, et quel dommage que vous ne compreniez pas cela !" Il ne peut pas, car il s'est lui même dépouillé des outils qui lui permettraient de comprendre - et voilà les matérialistes allant jusqu'à nier la vie et bientôt la matière. Quelle haine furieuse peut bien les habiter ?

  • La soupe intellectuelle primordiale

    soup.jpg Ou l'état intellectuel de l'esprit post-moderne. Qu'on en juge avec cette pièce philosophique exemplaire :

    Pourquoi rien n'est vraiment vivant

    Par Ferris Jabr  12 mars 2014

     Par un jour venteux à Ypenbourg, dans les Pays-Bas, il est parfois possible d'apercevoir des sculptures de la taille d'un bus galoper parmi les dunes de sable. Constitués principalement d'un complexe réseau de tubes en plastique imbriqués, de bois et de voiles, les squelettes mille-pattes se déplacent de façon si fluide et autonome qu'il est de tentant de penser qu'ils sont vivants. Leur créateur, l'artiste hollandais Theo Jansen, le pense assurément. "Depuis 1990, j'ai travaillé à créer des nouvelles formes de vie", explique-t-il sur son site web. Il les appelle Strandbeest. "Au final, je veux grouper ces animaux en troupeau sur les plages, afin qu'ils puissent vivre leur vie à eux."

     

    "Poétique, diraient la plupart d'entre-nous, mais les Strandbeest ne sont pas vivants. Ce ne sont que des machines - élaborées, très belles, néanmoins des conceptions inanimées". Il y a quelques mois, j'aurais acquiescé à ce raisonnement. Mais c'était avant qu'il ne me vienne une idée formidable sur la nature de la vie. Je dirais à présent que les Strandbeest ne sont ni plus ni moins vivants que les animaux, les champignons et les plantes. En fait, rien n'est vraiment vivant.

     

    Qu'est-ce que la vie ? La science ne peut rien nous répondre à ce propos. Depuis Aristote, les philosophes et les scientifiques se sont échinés, et ont échoué, à proposer une définition précise et universellement acceptée de la vie. A défaut, les traités modernes listent les propriétés supposées faire la distinction entre le vivant et l'inanimé, les plus importantes étant l'organisation, la croissance, la reproduction et l'évolution. Mais il y a d'innombrables exceptions : à la fois de choses vivantes dépourvues de quelques unes de ces caractéristiques, et de choses inanimées qui au contraire en possèdent.

     

    Les cristaux, par exemple, sont exceptionnellement organisés ; ils croissent ; et ils répliquent obstinément leur structures - mais nous ne les classons pas parmi les vivants. Pareillement, certains programmes informatiques dits "organismes digitaux" peuvent se reproduire et évoluer, mais peu s'empresserait de faire passer de tels logiciels dans le royaume des vivants. Inversement, certains organismes - tels des micro-organismes en forme d'ourse à la guimauve, appelés tardigrades ou les artémies (...) peuvent entrer dans une période d'hibernation extrême dans laquelle ils arrêtent de se nourrir, de grandir et d'évoluer jusqu'à une année entière - et pourtant ils sont considérés comme des organismes vivants.

    Dans les années 1990, un groupe de scientifiques chargés par la Nasa de trouver de la vie sur d'autres planètes, élaborèrent une définition opérante de la vie : un système autonome capable d'évolution darwinienne. Même cette définition n'identifie pas de façon satisfaisante la différence entre des êtres vivants et non-vivants.

    Considérez un virus : un morceau d'ADN ou d'ARN incorporé dans une protéine, qui pirate une cellule pour se répliquer. Les virus sont des reproducteurs terriblement efficaces, et qui à coup sûr évoluent bien plus rapidement que la plupart des créatures. Et pourtant les biologistes s'écharpent depuis des siècles sur leur appartenance à la catégorie des vivants, des inanimés ou entre les deux, dans une sorte de purgatoire. Gerald Joyce, un des scientifiques qui aida la Nasa à élaborer une définition de la vie, explique que le virus ne satisfait pas à la celle-ci, parce qu'il n'est pas "autonome", c'est-à-dire qu'ils ne peuvent évoluer que dans le contexte de la cellule qu'ils infectent.

    On peut dire la même chose de parasites bien plus gros où tout le monde s'accorde à dire qu'ils sont des êtres vivants. Les vers intestinaux assoiffés de sang, les plantes grimpantes qui sucent la sève des autres plantes, les champignons qui extrudent leurs ramures filandreuses à travers la carapace des araignées qu'ils ont tuées - tous ceux-là sont aussi dépendants de leur hôte pour se reproduire et évoluer que ne le sont les virus.

    Environ 10 ans après avoir travaillé dans le panel de la NASA, Mr Joyce élabora des expériences qui achevèrent de déconstruire la définition de la vie de l'agence. En laboratoire, lui et ses collègues amenèrent à l'existence deux molécules uniques d'ARN pouvant se répliquer l'un l'autre indéfiniment en suturant des séquences de nucléotides, leurs briques de construction. Quatre milliards d'années avant, dans la soupe primordiale terrestre*, de semblables RNA s'auto-répliquant ont pu spontanément** se former par le chaînage de nucléotides indépendants. En tant que briques de base du RNA, ils sont plus simples même que les virus, et, parce qu'ils peuvent se reproduire et évoluer, Mr Joyce admet qu'ils répondent eux aussi à la définition de la vie. Pourtant il hésite à dire qu'ils sont vivants.

    Pourquoi une telle ambivalence ? Pourquoi est-il aussi difficile pour les scientifiques de séparer clairement le vivant du non-vivant et se prononcer sur les virus équivoquement animés ? Parce qu'ils ont essayé de définir ce qui n'a avant tout jamais existé. Voici ma conclusion : "la Vie" est un concept, non une réalité.

    Pour mieux comprendre cet argument, il est utile de distinguer entre les modèles mentaux et les purs concepts. Parfois le cerveau créé une représentation d'une chose : la lumière se réfléchit sur un sapin puis dans nos yeux ; des molécules d'échappent en effluve de ses aiguilles et excitent des neurones dans notre nez ; le cerveau instantanément rapproche ces sensations de nos souvenirs pour créer un modèle mental de cet arbre. Parfois le cerveau développe un concept pur basé sur des observations - une façon utile de se représenter le monde. Notre notion idéalisée d'arbre est un pur concept. Il n'y a rien de tel que "l'arbre" en dehors de notre monde mental. Il y a plutôt des milliards de plantes individuelles que l'on a collectivement appelé "arbre". L'on pourrait penser que le botaniste a une définition précise et infaillible de l'arbre - eh bien non. Il est quelque fois franchement difficile de dire si une plante est un arbre ou un buisson, parce "arbre" et "buisson" ne sont pas des propriétés intrinsèques aux plantes ; ce sont des idées qu'on leur applique.

    De la même façon, "la vie" est une idée. Nous trouvons utile de penser que certaines choses sont vivantes, d'autres non animées, mais cette division n'existe que dans nos têtes.

    Définir la vie est non seulement futile, mais également inutile pour comprendre comment les choses vivantes*** fonctionnent. Toute matière observable est, à son niveau le plus fondamentale, un arrangement d'atomes et de leurs particules constituantes****. Ces associations se classent en complexité de la chose aussi simple que, disons, une molécule d'eau, à quelque chose d'extraordinairement compliqué comme une colonie de fourmis. Toutes les fonctions de la vie mise en avant - métabolisme, reproduction, évolution - sont en fait des processus qui apparaissent à divers niveaux de ce grand spectre de la matière. Il n'y a pas de seuil précis.

    Certaines choses que l'on considère comme inanimées sont capables de certains processus que nous voulons attribuer exclusivement à la vie. Et certaines choses que nous définissons comme vivantes peuvent très bien se passer de certains de ces processus. Et pourtant nous persistons à vouloir que toute matière naturellement se divise en deux catégories - vivante et non-vivante - et nous avons cherché en vain cette ligne de séparation.

     

    Il n'y en a pas. Nous devons accepter que le concept de vie parfois à une valeur pragmatique pour nos vues humaines particulières, mais cela ne reflète pas la réalité de l'univers en dehors de l'esprit.

    Notes :
    * La soupe primordiale est une théorie ; un scénario possible, non un fait avéré.
    ** Ce terme "spontanément" est le mot bazar des matérialistes ; tellement réfuté avec succès qu'on se demande d'où vient une telle complaisance. 
    *** utiliser un mot dont on veut prouver qu'il ne correspond à aucune réalité est intellectuellement troublant.
    ****  c'est en effet à partir de la particule que ça se corse ; la matière est-elle vraiment matérielle ?

  • Dans la série

    - Manger cinq fruits et légumes par jour
    - Manger trois produits laitier par jour
    - Se brosser les dents trois fois par jours pendant trois minutes
    - Se laver les mains dix fois par jour pendant trente secondes

    => ne pas oublier de boire 1,5 l d'eau par jour

     

    Bon. Ceci dit la bière étant composée de 80 à 90% d'eau, on n'oubliera certes pas. Il n'est pas indiqué combien de fois par jour on doit aller faire pipi.

  • L'art virtuel

    Dans la même optique que la précédente note, considérons l'art. Pour se libérer des contingences de la toile, de la forme et de la lumière, c'est-à-dire du savoir-faire, fut inventé l'art abstrait. Foin de toute cette matière, virtualisons tout cela par de la peinturluration verbale. Au spectateur d'imaginer : s'il ne voit qu'une merde, c'est sa façon de penser qui est le problème.

    Voilà une aubaine unique pour tous les philistins fortunés ; cette bourgeoisie vit là une opportunité inespérée pour faire main basse sur cet art, orpheline d'une aristocratie esthète disparue.

    Mais comme le mauvais sang ne saurait que mentir, on en resta pas là. Business is business, et cet art virtuel fut pris en charge par les financiers déjà passés maître de la virtualisation.

    Il en résulte l'AC, dit encore art financier, dont la monétarisation dépasse en irrationnel et superstition le plus fourbe des produits dérivés. Car in fine, le plus dérivé des produits dérivés dérive toujours d'une base matérielle ; on ne saurait en dire autant de l'AC : il ne repose sur véritablement rien d'autre que le boniment verbal et un packaging. D'aucuns prennent cela pour la définition ultime de l'art.

  • Le XXI° ou la naissance du sur-réel

    ... et la défaite du réel. Il est intéressant de noter que les Lumières, en réfutant toute possibilité de surnaturel, ont dans les faits poignardé la raison comme nulle autre époque auparavant. La raison s'est mise à errer comme une folle depuis, amenant l'homme à nier la loi de la gravitation universelle.

    Voilà le paradoxe : notre siècle est des plus techniques, et de moins en moins matériel. Le réel est trop limité et trop imprévisible.

    Cela a commencé avec l'économie, où il s'agit de s'affranchir des impondérables pour garantir aux placements financiers des revenus stables quelques soient les aléas systémiques. On créé donc des produits dérivés, voire dérivés de dérivés, de manière à réduire le risque tout en maintenant des rendements acceptables. Virtualisation de l'économie, 

    Cela se remarque en ce moment dans le secteur de l'informatique, où il s'agit de virtualiser les infrastructures de façon à s'affranchir de ses contraintes techniques, et de l'espace. La machine physique n'est plus qu'un support anonymisé, capable d'héberger n'importe quelles applications.

    Le plus patent est l'humain : le volontarisme au bout de sa logique dégénérée veut s'affranchir du corps, devenus l'ennemi numéro un car contraignant la volonté. Le corps n'est donc plus qu'un support physique anonyme censé accueillir n'importe quelle identité (sexuelle ou que sais-je), n'importe quel moi et sur-moi.

     

    Le hic est que toutes ces virtualisations tendent à faire oublier qu'à la base, il y a la matière. De l'oubli de la matière, du réel, vient tous les désastres économiques, informatiques et humains. Car le fait est têtu.