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Aius Locutius - Page 69

  • No comment...

    .. ou la mise à mort de la démocratie, par Daniel Cohn-Bendit.

    Comment décrédibiliser encore un peu plus la politique dans notre merveilleux pays, quand certains démocrates se sentant tellement en phase avec le demos qu'ils en oublient la pudeur de l'hypocrisie, s'aventurent dans l'honnêteté et la spontanéité comme une pucelle rue Saint-Denis  ?

    Daniel Cohn-Bendit donc, à ses militants d'Europe Ecologie, le 20 août 2009 :
    "Vous voulez une majorité, ou vous voulez avoir raison ?"

    Touchant n'est-il pas ? Voici en tout cas le plus terrible réquisitoire contre un régime démocratique jamais faite ce jour. Il donne finalement raison à Voltaire contre Rousseau. Il est vrai que Rousseau fut toujours majoritaire ces dernières décades. Donc selon le paradigme benditien, il ne pouvait avoir raison.

  • La raison du croyant

    Je ne vois pas en quoi, tant qu'il n'a pas été formellement démontré qu'il doit absolument y avoir quelque chose plutôt que rien, il serait déraisonnable de croire en Dieu plutôt qu'au néant, tant nous avons l'expérience de ce qui est plutôt que de ce qui n'est pas.

  • La métaphysique de Nietzsche, ou pourquoi Nietzsche est mort

    Nietzsche se défend, s'il faut en croire ses écrits, d'être métaphysicien. Il se disait anti-métaphysicien et fustigeait la métaphysique, comme il se disait "immoraliste" et fustigeait la morale (chrétienne en fait). Mais, sauf faiblesse de traduction, être "immoraliste" n'est guère qu'une autre façon d'affirmer l'existence de la morale (puisqu'on croit qu'il existe une anti-morale) ; il en est de même pour la métaphysique.

    Or donc :
    1° postulat métaphysique : Dieu est mort.
    2° postulat métaphysique : le monde est cyclique, de toute éternité. Nous sommes donc amenés à revivre la même vie indéfiniment.

    Où l'on voit que Nietzsche ne peut nier - même à son corps défendant - qu'il fait parti génétiquement de la même famille des métaphysiciens. Peut-être fut-il même l'un des  tout premiers 'pataphysicien.

    Sur ses deux postulats, et de son système d'outre-homme qui en découle, Nietzsche nous demande de le croire sur écrit, an ihm Glaube zu haben. Pour être plus précis, de croire que son corps et en conséquence son instinct sont parfaitement sains, performants, en forme olympique, fiables, et donc que ses fameux aphorismes sont justes, à défaut d'être vrai.

    Le problème est que cet homme, qui se prenait pour un messie athée, vécu malade. En 1889, le philosophe sombre dans la folie et bientôt la prostration la plus totale. Le destin le tint coi, estimant peut-être qu'il avait trop abusé du verbe et de ses tympans ainsi martyrisés. "Tais-toi, conjura le destin, tu as suffisamment vomit d'insanités pour le siècle fou qui va suivre."

    Toujours est-il que sa maladie fatale infirme toute son oeuvre : comment faire foi aux instincts et pulsions d'un homme au corps malade (sans même parler de son esprit) ? Comment être sûr que ses ouvrages n'aient pas été écrits sous l'influence non d'un instinct infaillible à son grand midi, mais de la maladie dégénérescente ? Les prédateurs recherche la bête malade aux instincts affaiblies, celle qui commettra le plus d'erreurs de jugement. Peut-être l'aurions nous cru, ou au moins aurions-nous eu de l'estime, s'il avait vécu comme il écrivit. Il n'en fit rien. Il aurait au moins pu vivre en Verbrecher, voire en Gewalttäter (en créateur comme il disait), et nous épargner à nous, société, le fardeau de sa maladie. Voilà qui eut été noble, aristocrate. Mais il vécut finalement comme la plèbe (comprendre le commun, vous et moi).

    Le messie des athées, qui proposa une religion de l'homme parfaitement inhumaine, est pourtant encore cru alors qu'il n'a jamais validé lui-même ce qu'il écrivit, par sa mort ou par sa vie. Il vécut l'opposé de ses écrits, tel le dernier et le plus petit des hommes. Humain, trop humain dirions nous.
    A contrario le messie des chrétiens valida toujours ce qu'il proclama, par sa vie et bien plus par sa mort. On en déduira en qui il faut avoir foi.

    Il s'ensuit que ce philosophe n'a probablement jamais pris au sérieux sa philosophie ; qu'il trouvât sans doute, sur un coup à la tête,  amusant de jouer quelque bon tour à quelques uns suffisamment nigauds pour prendre son oeuvre au sérieux.
    Mais c'est de la pure philosophe d'école qu'il proposa, un pressage de jus de cerveau en soi d'assez bon cru. Son crime est d'avoir laissé penser qu'on pouvait le prendre au sérieux.

    Bref, si on vous demande pourquoi vous réfutez Nietzsche, dites : "en vertu de Nietzsche et de ses coliques néphrétiques."

    Note : un jour il faudra que je rende le marteau que j'ai emprunté par distraction - me souvenir à qui le rendre...

  • L'objet du féminisme

    Au début, l'objet du féminisme était visiblement politique et social : il s'agissait de conquérir une place plus grande dans la vie de la cité.
    A présent que tout est acquis au moins formellement, le féminisme se trouve atteint de tous les symptômes de la cause orpheline. Il ne s'agit plus maintenant que de revendiquer des droits imaginaires, comme un vulgaire syndicat se crispant pour un treizième mois et demi. Ce ne sont plus des Dona Quichotta se battant contre de vrais moulins à vent. Ce ne sont plus que des moulins à parole se battant contre des mirages.

    Aussi le nouvel objet du féminisme ne concerne aujourd'hui visiblement plus que le corps : je fais ce que je veux de mon corps, parce que je le vends bien. Donc, à force de nous trompetter depuis des décennies que l'unique objet de leur préoccupation est leur corps, que leur corp est leur objet (j'allais dire : leur nouvel ustensile de cuisine), et bien voilà que ces mêmes féministes liftées s'insurgent contre l'exploitation de la femme-objet - sans se rendre compte une seule seconde qu'elles furent les complices actives de ce hold up marchand, c'est à dire les dindons de la farce.
    Qui peut empêcher de marchander un objet ? Elles ont soldé le corps de la femme, elles se plaignent ensuite d'avoir des acheteurs.

    (Voir pour s'en convaincre Elisabeth Badinter à propos de la gestation pour autrui - ou des truies en gestation, je ne sais plus très bien après avoir lu son interview.)

  • Kermesse nietzschéenne

    Un génie comme Nietzsche défonçant des portes ouvertes, profitons-en. Un petit coup de mou sans doute ; il faut toujours en laisser pour le chat... Bref, voici ce qu'on peut lire dans le "Crépuscule des Idoles" :

    "Le christianisme est un système, une vision des choses totale et où tout se tient."
    Pas mieux.
    Le christianisme est sans doute en effet le seul "système" absolument cohérent, parce qu'il est le seul "système" ayant notamment une vision juste et totale de l'homme (à contrario par exemple de la très partielle vision Nietzschéenne, instinctiviste, de l'homme : sa fascination pour le nez, l'un des organes sensoriels le moins développé de l'homme, est très surprenante).

    Mais c'est après que la muse de Nietzsche le déserte violemment :

    "Si l'on en soustrait un concept fondamental, la foi en Dieu, on brise également le tout du même coup : il vous reste plus rien qui ait de la nécessité."

    Edifiant non ? Une religion qui a pour concept la foi en Dieu, c'est une révolution ! Reconnaissons-le, l'affirmation est en tous cas difficilement attaquable - et c'est déjà très bien, pour un fils de pasteur, d'avoir compris que dans le christianisme, la foi en Dieu est un "concept fondamental".

    Pourquoi tous ces traits de lumière de la part de notre migraineux ? Pour nous expliquer que la morale chrétienne ne tient que par la foi en Dieu "vérité" (deuxième enfonçage de porte ouverte, cf post précédent), et de fustiger (car Nietzsche est un grand fustigeur, de profession) ces perfides Anglais qui pratiquent une morale chrétienne sans le Christ, et sans s'en rendre compte.
    Il a raison le cacochyme de fustiger l'incohérence. Mais alors il devrait chanter les louanges du christianisme.